Dominique COURET

Structure de rattachement (laboratoire, entreprise …) UMI Résiliences unité IRD 236
Ma fonction et/ou mon métier et/ou mon sujet de recherche DR2 IRD, Recherche en Géographie humaine et de terrain sur la question du développement en latitudes 23, l'adaptation et la résilience des sociétés et leur intelligence à savoir faire développement dans le contexte l'éco-écologie montante en Côte d'Ivoire. Programme "Intelligences des savoirs et savoirs faire du développement en Côte d'Ivoire et capacités à l'intégration des nouveaux modèles éco-écologiques en latitudes 23"
Quel intérêt trouvez-vous personnellement et/ou professionnellement dans les thèmes de l’atelier ? Professionnellement : Avec l'équipe du CIRES (Centre ivoirien de recherches économiques et sociales) l'UMI Résiliences unité IRD 236 (principalement Boniface Komena et Sainte Sébastienne Kouassi) et l'IGT, Institut de Géographie Tropicale de l'UFHB (principalement Ousmane Dembélé, Lazare Tia) nous nous engageons pour les 4 années à venir dans un programme d'étude et de réflexion à partir des projets de développement qui relèvent de l'éco-écologie montante en Côte d'Ivoire. Pour le moment nous avons trois cas d'étude autour du projet de thèse de trois doctorants en géographie : un sur le projet pilote REDD++ dans les terroirs villageois de la région de La Mée (thèse de Apolinaire Kouassi), un sur les projets de riziculture en petits barrages dans la région de Daloa (thèse de Denise Kobena Koné), un sur les réserves forestières du département d’Oumé (thèse de Yéo Yéo Nahoua). L'idée n'est pas seulement d'étudier mais aussi de documenter et d'accompagner, d'articuler avec l'évolution des savoirs des opérants et différentes parties prenantes. Il serait intéressant pour nous de pouvoir y adjoindre des cas d'étude urbains avec une même articulation avec des projets de thèse ou en postdoctorat, par exemple l'application de principes de ville verte et d'écologie humaine et environnementale dans le cadre des directives posées dans le Schéma Directeur du Grand Abidjan.

Personnellement : j'ai quelque difficulté avec la forme et la méthodologie de ce séminaire, étant plus habituée à construire une démarche collective à partir de la connaissance terrain et de la restitution par chacun de son objet, et puis certainement suis-je prise dans un effet de génération. Cela me rappelle cependant la forme d'un atelier organisé par le PNUD-Abidjan auquel j'avais participé dans les années 90. Il s'intitulait "Culture de dialogue, culture de conflit" et son objectif était de nous faire saisir que la parole et les positions différentes et non consensuelles soit exprimées, car sans cette expression pas de possibilité de dialogue ni d'avancée collective. Cela en grande partie car ils avaient observés que leurs partenaires ivoiriens avaient tendance à inhiber leurs idées alternatives par respect de celles proposées.
Par l'Atelier présent, j'espère améliorer ma capacité à participer à ce type de production collective et ainsi évoluer vers une inclusion plus forte de ma démarche de géographe de terrain et du développement dans une dynamique transdisciplinaire et trans-parties prenantes au développement.
A la lecture de la note de cadrage, je ne vois pas de thèmes mais des objectifs et des dimensions. Je comprends que les objectifs sont :
- engager le débat sur la cohabitation de sciences et des savoirs et sur les approches à mettre en œuvre afin de pouvoir atteindre les ODDs et surtout traiter de manière adéquate les interactions (positives, négatives ou neutres) entre leurs différentes cibles ;
- le développement durable et inclusif des villes comme axe de transformation (de quoi ?) pour atteindre les ODD avec en mire le défi d'un accès partagée équitable aux aménités urbaines, aux conditions de vies et un état de santé acceptables.
Et les dimensions essentielles sont :
- La nécessité de considérer les interactions entre plusieurs objectifs de développement durable ;
- Le bien être humain versus dégradation de la salubrité publique et de la santé individuelle : double fardeau sanitaire maladies infectieuses et parasitaires + maladies chroniques, accidents sur la voie publique et maladies mentales ;
- Le climat versus dégradations des conditions environnementales ;
- l'environnement versus surexploitation et dégradations des ressources et des services écosystémiques associés.
Je suis interrogative quant à la façon de faire, la forme, la méthode et les outils pour relier des dimensions si différentes et restituer notre production collective.
Participerez-vous au séminaire d'Abidjan ? Oui
Ville de résidence Paris
Que représentent pour vous les Sciences de la Durabilité ? La traduction de Sustainability en Durabilité n'est pas anodine, c'est le résultat d'un lobbying et un piège dans lequel l'ensemble des textes onusiens et des ODDs sont pris. Cela permet de faire perdurer le principe du libre commerce au-dessus des autres, tels que les lobbies économiques et financiers l'imposent encore et toujours dans la rédaction de ces textes. Ce qui est pérennisé c'est alors le système économique libéral de l'anthropocène, ce qui oblige à penser la réalisation des ODDs dans ce cadre. C'est antinomique avec l'autre possible traduction de Sustainability en Soutenabilité pour les sociétés et les milieux, pour l'homme et l'environnement planétaire, ce qui mettrait alors, sinon au-dessus de la plus-value financière, au moins à même niveau, les bénéfices pour les populations et les écosystèmes, la réalisation d'une économie de l'habiter (oekonomia) par la valorisation et le ménagement des ressources humaines et environnementales. Cette supériorité de la réalisation financière, faire passer la raison économique avant la précaution humaine et environnementale, c'est ce que par exemple Greta Thunberg et les écoliers en grève reprochent aux pouvoirs politiques.
Les Sciences de la Durabilité sont pour moi une nouvelle utopie pour réorganiser le financement des sciences et de la recherche dans le système économique néolibéral et celui de la concurrence entrepreneuriale et de la défense des intérêts partiels. Difficile d'avancer dans une démarche transdisciplinaire et connectée en restant dans cet esprit de concurrence entre sciences, entre parties prenantes ou concernées. Parler de sciences de la durabilité c'est parler de toute autre chose que de la science soutenable.
Vous comprendrez alors que les sciences de la durabilité ne soient pas mon objet d'intérêt, je préfère m'inscrire dans l'alternative de la "Sustainability science".
Selon vous, quel problème doit être résolu en priorité pour s’attaquer au nexus « Société -Santé – Climat – Environnement » dans les villes sub-sahariennes ? Je serais intéressée à ce que le nexus Santé–Climat– Environnement soit élargi à deux dynamiques humaine essentielles dans l'écosystème que constitue la ville : la dynamique du faire société (aspects social, culturel, gestion et politique de gouvernance) et la dynamique économique, en plus de la dynamique démographique et du phénomène de l'urbanisation. Le titre de l'atelier « Villes et communautés durables » en Afrique Subsaharienne » évoque la prise en compte de ces deux dynamiques. Sans la prise en compte de ces deux dynamiques il sera difficile d'aborder les interactions entre les différents ODDs, d'intégrer les différentes dimensions dans une vision stratégique et pragmatique, de poser les objectifs dans le bon sens. Il faut particulièrement être conscient de l'encapsulage économique par le principe de l'extraction de la plus-value financière maximisée à tous les niveaux et dans tous les domaines, surtout dans des situations de pays et de sociétés localisées en périphérie du système mondial ou l'application directe et respectée des autres droits (sociaux, humains, environnementaux) ne fonctionne pas.
Quels sont les principaux obstacles à franchir pour s’attaquer à ce nexus ? Il faudrait d'abord nous aider à mieux comprendre ce qui est dénommé Nexus au-delà du sens très général d'une connexion, "généralement là où de multiples éléments se rencontrent "et ce que cette alternative apporte par rapport à une approche systémique. Il serait très utile pour activer notre participation que ceux qui à l'origine du choix de ce terme, concept, paradigme, pattern ou hypothèse nous précise leur pensée.
Il faudrait clarifier les objectifs stratégiques qui sont visés : juste créer du lien et de l'échange pour une force intellectuelle ? Elaborer un "thing tank" ? Créer une communauté réticulaire de base pour répondre à des appels d'offres ou capter les fonds de développement ?
Quels sont les besoins de connaissance pour s’attaquer à ce nexus ? - Identifier ce qui est utile et utilisable par les différentes parties prenantes au développement
- Identifier les intérêts, les besoins et le rôle des différentes parties prenantes représentées par les personnes présentes.
- il faudrait savoir dans quelle perspective d'utilité nous nous situons. L'économie écologique ou éco-écologie humaine et environnementale, est la forme actuelle montante pour le développement d'une économie d'entreprise (publique, privée et civile) exploitant les marchés du bien-être, de la valorisation écologique des milieux habités et le ménagement des ressources environnementales.
Un certain nombre de normes de précaution et de préservation environnementale et sociale sont imposées par les en hauts internationaux dans la mise en valeur des sols et des sous-sols, pour lutter contre les effets du changement climatique et pour réduire les émissions de gaz à effet de serre. Ces normes servent de plus en plus d'encadrement à l'entreprise. Ainsi tout projet industriel ou de production économique se voit imposé les directives du groupe de la Banque mondiale en application des règles onusiennes et qui sont : l'obligation et le financement de préenquêtes et de diagnostics d'Impact environnemental et social ; l'application du droit des peuples autochtones et le financement de compensation pour les pertes subies en qualité, milieux et moyens de vie, l'obligation au déplacement des populations mises en danger et de financer leur replacement et la réhabilitation des sites abîmés en fin d'exploitation. Pour exemple en Côte d'Ivoire le respect de ces règles s'imposent à l'Etat pour l'obtention des prêts, des fonds de développement ou lorsqu'il contracte des investissements financiers internationaux. Elles sont à leur tour imposées aux entreprises nationales et internationales via les codes nationaux (de l'eau, de la forêt, des mines, …) quand elles engagent des productions industrielles polluantes ou exploitent une ressource environnementale. C'est par ce biais que la subvention et la prise en charge des mesures d'ordre social et écologique sont imposées aux entreprises. Ces entreprises finissent par ouvrir leur propre département de développement durable et créer des Comités de développement locaux pour gérés les fonds de subvention imposée. Il y a ici certainement une opportunité d'emplois et d'utilité pour les forces intellectuelles et l'intelligencia locale .
Cela crée aussi un appel à l'invention, l'expérimentation et la mise en pratique de nouvelles façons et de solutions qui peuvent trouver financement si elles restent dans la contrainte de la rentabilité d'entreprise. Il s'agit d'une nouvelle interpellation et mobilisation des forces intellectuelles et techniques pour de nouvelles formes d'exploitation et mise en valeur dont la validité se mesurera en terme d'aménités environnementales et sociales mais aussi et surtout en terme de gains économiques.
Par exemple, en Côte d'Ivoire, une Stratégie Nationale REDD++ , de Réduction des émissions de gaz à effet de serre dues à la déforestation et à la dégradation des forêts, a été mise en place impliquant le Ministère de la Salubrité, de l’Environnement et du Développement Durable, et pour cela le gouvernement de la Côte d’Ivoire a reçu un financement du groupe de la Banque mondiale pour la mise en œuvre du Projet d’Investissement Forestier (PIF) et du mécanisme de subventions dédiées aux populations autochtones et aux communautés locales (DGM-Dedicated Grant Mechanism). Dans le cadre du projet pilote de la région de La Mée) les paysans engagés dans la reforestation de leurs parcelles reçoivent un paiement mensuel.
D'un point de vue recherche, enseignement, formation et invention technologies, c'est-à-dire l'élaboration des sciences soutenables et exploratoires, on peut y voir tout un domaine transdisciplinaire d'exploration, de recherche et d'expérimentation subventionnées autour de la maîtrise d'un nexus « Economie de la forêt - Sociétés paysannes– Climat – Environnement »
Ne devrions-nous pas concevoir notre approche du nexus "Société-Santé-Climat-Environnement" dans les villes sub-sahariennes de la même façon ? Au-delà de traiter des seuls ODDs essayer de concevoir comment les différentes production de la recherche pour permettre aux opérateurs urbains (publics, privés, civils) de s'inscrire dans le cadre opérationnel générique imposé par la Banque mondiale : préenquêtes et de diagnostics d'Impact environnemental et social ; application du droit des peuples autochtones et financement de compensation pour les pertes subies en qualité, milieux et moyens de vie ; l'obligation au déplacement des populations mises en danger et de financer leur replacement et la réhabilitation des sites abîmés en fin d'exploitation.
Cela me paraît la seule façon de nous inscrire dans les formes économiques et juridiques concrète de cette éco-écologie au niveau local mais aussi pour participer à la pression scientifique et citoyenne a exercer aux niveaux des forums onusiens et internationaux
Quel type d’action susceptible d’aider à la résolution du nexus menez-vous ? Je ne comprends pas encore bien en quoi consiste un nexus, je le comprends pour le moment comme une connexion phénoménologique, une articulation entre plusieurs phénomènes, alors je ne vois pas en quoi on peut résoudre un fait …
Qu’attendez-vous de l’atelier d’Abidjan ? J'espère pouvoir sortir de nos échanges sur ce nexus Santé–Climat– Environnement dans les villes sub-sahariennes, des pistes de partenariat , des sujets et des encadrements pour des thésards et des idées pour élaborer des cas d'étude urbains qui pareillement correspondraient aux projet de thèse de doctorants de l'IGT et qui puissent participer à la dynamique du PSIP " Vulnérabilité des zones littorales dans un contexte de changement global", et, secondairement, aux PSIP « Dynamiques urbaines et développement durable», "Intensification de l’exploitation des ressources naturelles, dégradation de l’environnement et impacts sociaux-sanitaires", "Identification et évaluation des politiques de réduction de la pauvreté et des inégalités", voir "Optimisation des systèmes alimentaires pour le développement durable et le bien-être des populations". Il est par exemple intéressant pour nous d'avoir cette occasion d'échanger avec madame Marcelle Tagro-Nassa, chargée de la mission de l'Embellissement urbain au Ministère de la Ville et de la salubrité urbaine, et monsieur Yao Guy-Michel, Chargé de mission infrastructures et croissance économique au JICA (coopération japonaise qui a réalisé le Schéma Directeur d'Urbanisme du Grand Abidjan (2014), ou encore monsieur Pierre Dandan, Directeur assainissement et drainage au District autonome d'Abidjan et madame Chloé Wagner de l'ONG Eau et Vie…
En quoi l’atelier vous sera utile dans vos activités futures ? Pour le moment ce que je vois : être présent et identifier comme travaillant ces questions et plus exactement travaillant à l'étude de cette éco-écologie montante en Côte d'Ivoire ; accéder aux moyens de financement pour mon unité et pour mes partenaires ; participer à me donner les sujets et les moyens de formation et de promotion d'intelligences stratégiques et scientifiques locales.